La Guerre des Clans
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Une vie ne vaut rien quand on se bat pour la paix d'un peuple...
 
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 Une visiteuse bien ordinaire ?

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Tsukiyo Kikuta
Chef Kikuta
Tsukiyo Kikuta


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MessageSujet: Une visiteuse bien ordinaire ?   Une visiteuse bien ordinaire ? EmptyDim 19 Fév à 21:57

Et voila. Au terme d'un voyage de plusieurs jours, Tsukiyo arrivait enfin dans la ville de Maruyama. Tandis qu'elle déambulait entre les échoppes et les habitations en cette fin de journée, elle gardait toujours à l'esprit le but de sa visite : le palais de la Dame. Mais il lui restait encore un peu de temps. Sans cesser de se rapprocher du bâtiment grandiose où résidait Dame Maruyama, Tsukiyo flânait donc un peu. Elle observait la vie bourdonnante de la grande ville, si éloignée du calme et du recueillement des montagnes où elle passait le plus clair de son temps. La ville elle-même était intéressante et aurait valu le déplacement. Elle assista à un spectacle de rue un peu minable, une procession de moines bouddhistes en méditation et à une bagarre de rue déclanchée par deux ivrognes qui laissa plusieurs hommes inconscients sur le bas-côté.

Alors qu'elle traversait une rue plus petite que les autres, la vue d'individus à l'aspect peu engageants lui tira une grimace de dégoût et lui rappela la dernière étape de son voyage.
En effet, après s’être délassée un moment devant le petit commerce où elle s’était arrêtée et avoir remercier le tenancier pour le repas et pour son hospitalité, elle s’était remise en marche, prête à rejoindre la ville de Maruyama. Pourtant cette section fut moins reposante. En effet, après quelques heures de marche, elle observa au loin un groupe de trois hommes armés qui venaient dans sa direction sur le chemin. Lorsqu’ils se furent rapprochés, elle découvrit avec agacement qu’il s’agissait de jeunes incapables, croyant obtenir facilement et sans effort richesse et gloire en dévalisant les riches commerçants qui employaient cette route. Tsukiyo avait soupiré, elle aurait tellement voulu pouvoir éviter ce genre de rencontre stérile et violente. Il semblait évident que ces brigands, trop frustres pour reconnaître le danger, allaient voir une femme seule comme l’occasion de s’amuser un peu. Elle devinait déjà leur « chef » enjoignant à ses subordonnés de lui laisser le privilège de jouir le premier de leur future acquisition.

En effet, c’est exactement ce que ce rustre avait soufflé à ses comparses. Il se voyait déjà passer la nuit en agréable compagnie avant de laisser les deux autres nuisibles en profiter à leur tour. Sa confiance en lui, née de bien des mois de rapines et de vols, n’avait pas de borne et il allait, le pas conquérant. Pourtant à l’instant même où il allait se saisir de cette jolie jeune femme qui marchait si inconsciemment sur la grand route sans lui prêter la moindre attention, celle-ci tourna la tête dans sa direction et leurs regards se croisèrent une fraction de seconde.

Il vit le coup partir, doigts étendus vers l’avant droit dans la direction de sa gorge qu’ils enfoncèrent comme si sa trachée était faite de papier. Il se vit, étouffant et s’écroulant sol alors même que qu’une lame fine comme la membrane d’une fleur de cerisier traçait un sillon vermeil le long de la carotide de son bras droit et que dans le même temps, une jambe d’une exquise finesse s’élevait et s’abattait sur la nuque de son dernier comparse, brisant net ses cervicales.

Le voila qui haletait. Ses jambes refusaient de bouger, clouée au sol par la peur. Tout son corps avait le poids de la montagne. Ses yeux étaient écarquillés par la terreur. Rien n’avait été réel. La femme s’éloignait déjà le long du chemin sans un mot, sans un geste suggérant qu’elle avait pu seulement remarquer la présence des trois hommes. Les deux subordonnés observaient d’ailleurs leur chef, interdits. Ils ne comprenaient pas sa réaction, ou plutôt son absence de réaction et commencèrent donc à rebrousser chemin pour rattraper la femme. Cependant le chef les rappela d’un mot. Non, impossible, il venait de comprendre. Ce qu’il avait ressenti, c’était le Ki de la femme, sa volonté ou sa force vitale concentrée… Il savait que si il avait ne serait-ce que lever la main sur elle, il aurait instantanément trouvé la mort. Et ses hommes l’auraient suivi.

« Attendez ! Laissez-la. Cette femme… C’est la Mort. »



Plus loin, Tsukiyo souriait. Une confrontation évitée et elle n’avait tué personne, cette fois. Elle espérait que la chose ferait réfléchir ces malandrins. Après tout, elle ne voulait pas non plus regretter de leur avoir laisser la vie sauve.


Ses réflexions l’avaient portée enfin jusqu’aux portes du palais. La demeure était grandiose. Une telle beauté était signe d’un goût sûr et d’un esprit cultivé et subtil. Elle aimait ce qu’elle voyait là. L’harmonie qui émanait des lieux était de bon présage. Car c’était l’harmonie elle-même qui constituait le but ultime de la jeune femme.
Tsukiyo prit tout de même un instant pour s’inspecter : elle était légèrement poussiéreuse et donna quelques coups du plat de la main à son kimono mauve pour en chasser le plus gros des traces de son voyage. Elle s’assura que ses diverses armes étaient impeccablement dissimulées et que nul ne risquait de découvrir la croix qu’elle ne quittait jamais.
Puis elle se dirigea d’un pas sûr vers la porte dans le but évident de s’annoncer et de demander l’honneur de pouvoir jouer pour la Dame au cours de son repas ou au moment qui lui siéra, si toutefois Sa Grandeur consent à accorder une fraction de Son temps si précieux aux piètres compétences qu’une humble servante peut mettre à Sa disposition pour Son agrément.
Là elle attendit qu’on daigna lui ouvrir ou lui faire porter une réponse. Si cette approche ne fonctionnait pas, elle trouverait bien autre chose…
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Keiko Maruyama
Dame Maruyama
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MessageSujet: Re: Une visiteuse bien ordinaire ?   Une visiteuse bien ordinaire ? EmptySam 25 Fév à 17:35

Un garde massif traversait en courant les jardins du palais, faisant jouer le soleil avec le métal luisant de son armure. Il était de faction à l'entrée principale du château des Maruyama lorsqu'une étrange jeune femme avait fait son apparition, demandant une entrevue avec Dame Maruyama, afin de la divertir lors de son repas. Le jeune guerrier s'était alors empressé d'avertir la vieille Suzu. La plus ancienne des servantes de la maison Maruyama écouta attentivement ce que le jeune homme avat à lui dire, avant de hocher lentement la tête et de le remercier. Elle quitta le quartier des servantes, pestant en chemin contre son genou qui la faisait souffrir les jours de grande chaleur, comme c'était le cas aujourd'hui. Il était temps qu'elle prenne sa retraite, mais délaisser cet endroit merveilleux pour retrouver sa campagne sale la faisait systématiquement grimacer. Etre servante chez les Maruyama, c'était comme être princesse chez les Tohan. Du moins, c'était ce que le paysans se plaisaient à dire lorsqu'ils envoyaient leurs jeunes filles travailler au domaine.

Suzu entreprit d'abord de se diriger vers les appartements de sa maîtresse. Mais elle revint vite sur ses pas, à une heure pareille, cela faisait bien longtemps que l'entraînement avait commencé. La vieille femme clopina donc jusqu'à la salle d'arme. Il y faisait frais, malgré l'intense odeur fournie par les efforts des Kunoichis s'entraînant dans la salle. Après de brèves questions à certaines d'entre elles, Suzu apprit que Dame Maruyama s'était rendue prier auprès de ses ancêtres, dans le petit sanctuaire qu'abritait l'immense jardin. Décidémment, ce ne serait pas aujourd'hui non plus que la servante se reposerait. Elle parvint enfin au sanctuaire et y trouva sa maîtresse, parée d'un kimono léger en soie blanche, agenouillée devant les stèles de sa famille, un bâton d'encens entre les mains.

"Ton genou te fait encore souffrir Suzu...Je t'entends grommeler depuis de longues minutes déjà. Tu ne devrais pas te donner autant de peine, les jeunes servantes que j'ai engagées sont là pour ça. "

Suzu s'inclina pour répondre

"Vous savez combien je vous suis dévouée ma Dame."

Keiko se retourna et sourit à la vieille servante qui l'avait élevée. Elle se leva et aida la vieille femme à se redresser.

"Et tu sais combien je tiens à toi, alors ne force pas trop Suzu. Bon, dis-moi donc ce qui t'as fait traversé le parc par une pareille chaleur."

"Une jeune dame s'est présentée à l'entrée. Elle dit être une artiste de rue et voudrait vous faire une démonstrations de ses quelques talents. Néanmoins, je vous prie de m'excuser, mais je trouve cela suspect. En général les troubadours et les jongleurs viennent en troupes et non pas seuls..."

"Tu as parfaitement raison...C'est précisément pour cela que nous la ferons entrer. Si elle prends le risque de pénétrer seule ici avec de mauvaises intentions, je tiens à la féliciter de son courage!"

Keiko riait de bon coeur malgré la fatigue qui la tenaillait. Elle n'avait pas dormi de la nuit. D'une part à cause de sa conversation avec Hideto qui avait longuement duré, et d'autre part parce qu'à chaque fois qu'elle fermait les yeux elle revoyait ses amies se faire tuer dans l'enceinte du château Tohan.

"Invite-la à l'intérieur et sert lui le thé dans le pavillon prévu à cet effet. Dis-lui que je dors encore car je reviens d'un voyage important. Demande à Naoki de rester avec elle. Elle l'observera..."

Suzu acquiesa avant de reprendre son chemin vers la demeure principale. Arrivée à l'entrée, elle s'adressa à la jeune femme. Quelle étrange personne était-ce! Elle inspirait la crainte et le respect à la fois, et malgré elle Suzu ne put s'empêcher de retrouver beaucoup de Dame Maruyama, dans cette femme qui avait maintenant pénétré à l'intérieur du palais.

"Ma maîtresse ne peut vous recevoir pour le moment. Elle rentre d'un long voyage et doit se reposer. Mais elle a néanmoins tenu à vous faire entrer. Son respect et son admiraiton pour les artistes ne lui permet pas de vous laisser patienter dehors..."
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Tsukiyo Kikuta
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MessageSujet: Re: Une visiteuse bien ordinaire ?   Une visiteuse bien ordinaire ? EmptyLun 27 Fév à 21:21

Tsukiyo dut patienter quelques minutes avant de voir arriver une vieille femme voûtée mais dont le regard pétillait de vie et de bonté. Un signe supplémentaire de la qualité de la Dame. Nulle âme vile n'eut pu imposer pareil comportement à des serviteurs, pas même par des menaces de mort. Celle qui dirigeait cette province depuis l'intérieur de ces murs possèdait la trop rare qualité qu'est l'humanité.
Voyant la vénérable ancètre s'approcher, Tsukiyo s'inclina profondément et resta humblement ainsi en attendant que la femme se décide à lui faire connaître les souhaîts de Dame Maruyama. Elle sentait les yeux étrangement jeunes de la servante sur elle, comme si celle-ci la détaillait et l'étudiait, jaugeant quel genre de personne se trouvait devant elle avec l'expériences d'années passées au service du domaine et des Seigneurs de Maruyama.
Quand enfin Suzu parla, Tsukiyo se redressa pour s'adresser à elle, croisant le regard de la servante un instant. Elle prit soin de contrôler complètement son propre regard, s'eforçant de laisser ses yeux vagabonder dans le direction générale de son interlocutrice, sans jamais faire le point sur elle. Un entraînement rigoureux avait permis à la Kikuta de connaître un grand nombre de méthodes de dissimulation et de déguisement. Elle savait à présent simuler sans faille le comportement d'une artiste itinérante mal voyante. Elle n'appréciait pas forcément de tromper une vieille femme apparemment si gentille mais c'était un moindre mal car de grandes choses seraient peut être bientôt possibles. Si seulement la Dame s'avérait un allié sûr.

"C'est un immense honneur que me fait Sa Seigneurie à moi qui suis indigne de son attention. J'espère pouvoir, par quelque moyen, justifier la confiance qu'Elle m'accorde et me montrer digne de Sa demeure ancestrale."

Elle s'inclina à nouveau, les yeux sur le sol, guettant, par l'ombre projetée sur les graviers, les mouvements de la servante. Puis, lorsque celle-ci se fut remise en mouvement pour la guider, Tsukiyo la suivit d'un pas hésitant, comme si le son et de vagues contours et mouvements seulement lui permettaient de s'orienter. Elle serra dans ses bras son instrument de musique, figurant l'anxiété justifiée qu'aurait éprouvé tout saltimbanque sur le point d'éprouver son art dans la demeure, sinon en présence, d'une des plus grandes dames du pays.
Elle montra une certaine déception compréhensible (et authentique) lorsqu'on lui annonça que la Dame se reposait dans ses appartements et n'était pas disponible pour l'heure. Mais cela ne changeait rien à ses plans, un Seigneur pouvait faire attendre des visiteurs des semaines... Alors un saltimbanque... Elle la ferait appeler lorsqu'elle en éprouverait l'envie, Tsukiyo était préparée à ça.

"Je suis au service de Sa Seigneurie. Son bon vouloir est comme un ordre pour moi. Je Lui suis reconnaissante de souffrir ma présence en sa demeure."

Elle laissa passer quelques instants.

"La province a bien de la chance d'avoir une Dame comme Sa Seigneurie à sa tête. Elle a vraiment l'intérêt de son peuple à l'esprit, n'est-ce pas ? J'espère que Son voyage s'est bien déroulé..."

Ca ne coûtait pas grand chose de prospecter un peu avant de rencontrer la Dame, après tout....
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Keiko Maruyama
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MessageSujet: Re: Une visiteuse bien ordinaire ?   Une visiteuse bien ordinaire ? EmptySam 11 Mar à 1:00

La servante hésita. Devait-elle répondre et parler de sa Maîtresse ainsi, alors qu'elle ne lui en avait pas donné la permission. De plus, la jeune troubadour ne lui inspirait pas confiance et il n'était pas dans ses habitudes d'être loquace face à des individus douteux...Surtout pas lorsqu'il s'agissait de Dame Maruyama...Soudain un sourire franc mais discret vint éclairé le regard inquiet de la jeune femme. Elle planta son regard dans celui de l'inconnue et dit, un soupçon de triomphe dans la voix:

"Dame Maruyama se fera un plaisir de répondre à toute vos questions, là voilà justement"

N'importe qui aurait pensé que la jeune servante n'avait pas tous ses esprits. Personne n'était en vue à par elle, la troubadour et la vieille Suzu qu'on voyait marcher au loin, en direction du quartier des Servantes. Cependant, quelques minutes s'écoulèrent et comme par miracle elle apparut. Deux immenses porte de bois laquées du peinture rouge sang s'ouvirent silencieusement sur Dame Maruyama. Cette dernière, vêtue d'une simple tunique de lin blanc, mais néanmois richement brodée, s'avança, comme flottant dans les airs, jusqu'au pavillon du thé. A sa vue, les domestiques présents d'inclinèrent. Traversant la haie d'honneur, Keiko pénétra dans le pavillon. Un signe de tête pour que se relèvent toutes celles qui étaient baissées, et elle s'assit en tailleur, face à l'inconnue.

"Bienvenue dans le palais des Maruyama, les artistes y trouveront toujours une place de choix."

Keiko claqua des doigts et deux servantes sorties de nulle part vinrent remplir son gobelet d'argile de thé fumant. La jeune femme porta le breuvage à ses lèvres et aspira le liquide.

"Le jasmin est sans doute ma plante préférée...Sous toutes ses formes..."

Enfin, pour la première fois depuis son appartition, Dame Maruyama s'autorisa à regarder celle qui lui faisait face. Tout de suite, un détail la frappa. Ses mains. Ce n'étaient pas des mains destinées à tenir un instrument. Pas non plus les mains d'un mime ou d'un acteur. Encore moins les mains d'une femme...C'était les mains d'une chasseuse redoutable et précise. Bien qu'en pleine observations de ses ustensiles de la mort, Keiko sentit un regard peser sur elle. Elle dévia alors sur le visage de la jeune femme. Des yeux de glace. Mais habilement dissimulés derrière un regard franc et goguenard.

*Habile actrice*

"Une chose m'étonne, mademoiselle...Il est rare de nos jours et en nos temps si sombres, de voir une femme se promener seule sur les route...Ou est le reste de votre troupe?"
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MessageSujet: Re: Une visiteuse bien ordinaire ?   Une visiteuse bien ordinaire ? EmptySam 11 Mar à 22:07

Tsukiyo avait gardé le silence après sa dernière question. La réaction de la servante en disait plus long qu’elle ne l’aurait cru. N’importe quel authentique domestique se hâte d’échanger des anecdotes sur son maître quel qu’il soit, bienveillant ou cruel, ne serait-ce que pour souligner ses propres conditions de vie. Les saltimbanques ambulants avaient ce statut si particulier qui en faisait des confidents appréciés : après quelques jours ils seraient partis et les confidences mouraient en même temps… Un silence de la part de la jeune femme dénotait d’une rigueur qu’aucune relation maître-servant ne pouvait garantir.
D’ailleurs la démonstration des possibilités de la pseudo domestique qui suivit fut tout sauf subtile. Si jamais Tsukiyo avait encore entretenu des doutes, elle se trouvait maintenant complètement assurée de la nature de son guide. A la décharge de cette dernière on pouvait tout de même dire qu’un hôte ordinaire n’aurait sûrement pas noté ces détails... Et qu’il n’aurait pas entendu lui aussi la Dame alors qu’elle était encore hors de vue.
A l’annonce de l’arrivée de Dame Maruyama, Tsukiyo simula un accès d’anxiété supplémentaire et ne souffla mot, comme si l’imminence d’un tel honneur lui coupait le souffle. Puis elle se laissa guider. L’apparition de la Dame la laissa pourtant de marbre, en bonne « aveugle » qu’elle semblait être. Pourtant intérieurement elle commença à analyser la situation.
Une belle femme, mais le vernis de la cour qui cachait habilement la vraie nature de la Dame ne pouvait occulter ce quelque chose de dangereux dans sa démarche : sa façon de toujours conserver un équilibre parfait, de prendre ses appuis soigneusement sans laisser filtrer l’impression d’être parfaitement consciente de son environnement… Tsukiyo ne pouvait s’y tromper. Et plus encore : une aura bien spéciale entourait Dame Maruyama. La marque de la grandeur. Il semblait qu’elle ait l’étoffe des grands leaders, c’était d’autant plus étrange de penser que quelqu’un possédant ce charisme puisse perdre son temps avec les arts secrets des shinobis quand il était évident que tant de personnes seraient honorées de mourir pour elle… Enfin telle était la teneur des réflexions de Tsukiyo, qui estimait ne pas se tromper dans son analyse, même si pour l’instant, elle n’avait effleuré que la surface des choses…

Introduite enfin en présence de la Dame, la Kikuta tomba à genoux sans bruit mais avec une certaine maladresse volontaire, comme terrassée par la majesté de son entourage. Elle posa soigneusement ses mains sur ses jambes et s’inclina autant que possible, gardant les yeux sur le parquet et les bras contre ses côtes dans une attitude respectueuse formelle tout à fait digne. Elle resta ainsi comme il convenait en attendant que la Dame daigne lui adresser la parole car il ne convenait pas à un troubadour d’élever la voix devant une si grande dame sans son autorisation ou pour répondre à une question directe.


"Une chose m'étonne, mademoiselle...Il est rare de nos jours et en nos temps si sombres, de voir une femme se promener seule sur les routes...Où est le reste de votre troupe?"

« Madame, on vous aura mal informée, je le crains… J’exerce humblement mes maigres talents pour animer les cérémonies et les danses de cour. Tel est mon art, le bugaku. Et je suis solitaire, car tout accompagnement, hormis l’attention de nobles souverains tels que vous, Maruyama no kami, serait superflu et alourdirait cette délicate musique. Car si je peux me permettre, ne fermons nous pas les yeux pour profiter pleinement de la douce mélodie du ruisseau sans être assailli par le chaos de la présence des hommes ? Il en va ainsi du vrai art et c’est la Voie que je me suis fixée. Pourtant j’en suis en fort loin et mes talents sont indignes de vous, c’est pourquoi vous me faites un honneur trop grand en acceptant ma présence aujourd’hui. J’ose espérer ne pas imposer mon incompétence en un instant que vous voudriez consacrer à la réflexion ou aux affaires de votre peuple.»

Elle conservait la même posture et gardait les yeux baissés.
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MessageSujet: Re: Une visiteuse bien ordinaire ?   Une visiteuse bien ordinaire ? EmptyDim 19 Mar à 18:05

Dame Maruyama posait un regard empreint d'intérêt sur le dos que lui offrait la troubadour. Dès son entrée dans le pavillon, elle s'était inclinée et depuis, même après que la Dame se fut assise et eut absorbée une gorgée de thé en prenant tout le temps nécessaire à l'accomplissement de ce geste, elle n'avait pas tremblé d'un pouce. Tant de rigueur impressiona Keiko. D'ordinaire, les saltimbanques qu'elle accueillait étaient pétrifiés face à elle. Elle distinguait leurs tremblements qui les empêchaient de prendre le thé avec elle, de peur de faire tomber les tasses. Elle voyait nettement les frissons parcourir leur échine et leur doigts, pourtant réputés agiles, devaient parfois si reprendre à plusieurs reprises pour faire valser les quilles et les ballons. Mais la femme qui se tenait accroupie face à elle ne cillait pas. Même sous le silence pesant qui avait envahit la pièce, elle ne bougeait pas. Son visage était comme ancrée dans le sol. Keiko observait cette scène et se surprit à penser alors que si elle attendait encore quelques instants, la mucisienne finirait par se fondre dans le marbre rosé.

"Vous pouvez vous relevez"

Dame Maruyama ne quitta pas des yeux son invitée et celle-ci une fois redressée, elle reprit la parole d'une voie légère, où l'on pouvait deviner une réelle sympathie, denrée rare chez les Seigneurs d'aujourd'hui...

"Hé bien, je serais ravie de vous entendre pratiquer votre art, mademoiselle... Néanmoins avant tout, j'aurais aimé connaître votre nom. Une telle artiste doit sûrement être précédé par sa renommée..."

Keiko fit un geste gracieux en direction des deux servantes présentes dans la pièce. Un doux parfum de ce précieux jasmin qu'elle affectionnait tant accompagna son mouvement.

"Veuillez nous laisser seules, j'aimerais profiter de cet art si délicats sans qu'aucun dérangement ne soit occasionné..."

Sous le regard inquiet de ses servantes, et kunoichis, qui ne voyait pas d'un très bon oeil le fait de laisser leur Dame seule avec une inconnue, Keiko affirma son geste fit son regard plus dur. Les demoiselles se résignèrent, sachant pertinemment que ce que Keiko désire ne peut lui être ôté de l'esprit. Elle diparurent rapidement derrière les pans de bois du pavillons et s'éloignèrent vers les bâtiments principaux du Domaine.

"Bien...Passons aux choses sérieuses..."
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MessageSujet: Re: Une visiteuse bien ordinaire ?   Une visiteuse bien ordinaire ? EmptyMer 22 Mar à 23:45

Tsukiyo resta prostrée jusqu'à ce que la Dame lui ait fait signe de se relever.
Un tel comportement était le bienvenu... Non parce que Tsukiyo commençait à trouver le temps long (son entrainement lui permettait de rester ainsi des heures durant, si ce n'est des jours entiers), mais plutôt parce que cela indiquait une disposition plutôt favorable envers elle. Keiko semblait au moins un minimum réceptive ; peut être seulement envers la troubadour... Mais cela serait toujours utile si on en venait aux négociations...

"Maruyama no Kami, Vous me faites trop d'honneur. Mes compétences sont bien faibles et ne vous rendent pas justice mais j'espère pouvoir faire de mon mieux pour vous distraire par mes humbles talents. On me nomme Tsukiyo car il faisait nuit lors de ma naissance, mais la lune brillait comme le soleil lui-même, ma dame."

Elle attendit encore en silence le temps que les servantes (et les autres)se soient enfin retirées et s'installa ensuite de façon à offrir le meilleur spectacle possible à la Dame. Les yeux toujours dans le vide, un imperceptible sourire aux lèvres, elle accordait son instrument.

"Avec votre permission, Ma Dame, j'aimerais jouer une ancienne ballade. Elle célèbre les amis disparus et rend honneur à leurs âmes. Il est dit qu'elle appaise aussi le chagrin des vivants...."
Elle fit une pause pendant une fraction de seconde.
"Mais avant tout, elle est d'une grande beauté et d'une délicatesse sans pareille, j'espère m'en montrer digne, pour vous."

Elle entama aussitôt un morceau magnifique mais aussi particulièrement mélancolique. Le jeu de Tsukiyo était d'une grande sobriété, presque dépouillé. Il mettait à nu une souffrance lancinante et une éternité de regrets, et pourtant dans le même temps, il appaisait peu à peu l'auditeur. Tsukiyo, elle restait de marbre, comme extérieure au monde. Pourtant elle resentait sa musique comme seuls le pouvaient ceux qui avaient connu cette perte. Elle avait choisi de jouer ceci non seulement comme un message à la Dame mais aussi pour elle-même.
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MessageSujet: Re: Une visiteuse bien ordinaire ?   Une visiteuse bien ordinaire ? EmptySam 25 Mar à 18:07

"Avec votre permission, Ma Dame, j'aimerais jouer une ancienne ballade. Elle célèbre les amis disparus et rend honneur à leurs âmes. Il est dit qu'elle appaise aussi le chagrin des vivants...."

Keiko ne put camoufler sa surprise tant les paroles de la dénommée Tsukiyo l’avaient désarçonée...Elle sentit comme un étau enserrer son coeur et l'emprisonner pour l'empêcher de battre. La jeune femme en eu le souffle coupé et lorsqu'enfin elle s'en fut libéré, la délivrance fit place bien rapidement à la douleur. Elle avait mal...Son coeur avait était comme tordu, essoré de tout sentiment de bonheur, comme on aurait vulgairement pressé un citron. La panique l'envahit et elle fit preuve d'un grand sang-froid pour ne pas alerter la troubadour. Elle tenta alors de ce concentrer sur le morceau pour ne plus penser à sa souffrance. Mais ce fut une erreur...

Il suffit d'un instant d'écoute, le temps pour la musicienne de jouer les premiers accord avec une légèreté sans pareil, pour que les souvenirs submergent Keiko. Elle revécut son sombre voyage en pays Tohan, où elle avait perdu deux de ses Kunoichis et amies...Elle se sentit misérable et la tristesse grandissait à mesure que la musique emplissait le pavillon. Elle retint à grand peine les larmes qu'elle avait déjà retenues depuis son retour au domaine et soudain au moment où elle sentait qu'elle ne pourrait plus tenir longtemps, un étrange apaisement l'envahit. Et le chagrin céda sa place avec une facilité déconcertante. Ses larmes s'envolèrent avec les dernières notes. La mélodie avait pris fin et le silence reprit ses aises. Enfin, après avoir repris une partie de ses esprits, Keiko lâcha:

"Votre talent est un don…"

Elle avait murmuré ces mots, encore sous le choc.

"C’est étonnant, vraiment…Je viens moi-même de perdre des proches et je croyais en avoir fait mon deuil, mais votre mélodie a ravivé leur présence en moi, de manière douleureuse…De même qu’elle m’en a ensuite libérée pour laisser place à un apaisement sans pareil… Quelle coïncidence que vous ayez justement entamé ce morceau. La tristesse se lisait-elle sur mon visage ? Je pensais maîtriser mes émotions mieux que cela…Oui, une drôle de coïncidence…"


Keiko se tut, laissant planer un long silence quelque peu déroutant. Puis son regard se fit plus tranchant sur Tsukiyo et ce fut d’une voix tout à fait différente car beaucoup plus dure qu’elle conclua finalement:

"Mais je ne crois pas au hasard…"
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MessageSujet: Re: Une visiteuse bien ordinaire ?   Une visiteuse bien ordinaire ? EmptyVen 14 Avr à 15:15

Les dernières notes s'envolaient.
Tsukiyo prit une profonde inspiration. Elle non plus ne jouait pas cet air sans en ressentir les effets. C'était aussi sa façon d'honorer les êtres chers disparus, un moment privilégié où ils semblaient presque à portée de main. En un sens c'était aussi son présent à Dame Maruyama... Dieu savait que le futur risquait fort de ne receler que douleur et peines....

"Votre talent est un don…"

"Ma Dame me fait trop d'honneur, mon talent n'est que bien peu de choses."

Mais Keiko n'en avait pas fini. Elle se lança dans une longue tirade et finit sur une note à la fois inquisitrice et incisive. Au moins elle avait saisi une partie des motivations de Tsukiyo... Mais la Kikuta ne pouvait pas encore être sûre de l'étendue du savoir de son interlocutrice. La plus grande prudence s'imposait à présent.

"Ma Dame, je vous le répète, mon talent n'a rien à voir là dedans, c'est ce simple air qui est à l'origine de tout ce que vous avez ressenti. Comme le messager qui apporte des nouvelles des régions éloignées de la province mais n'est en rien responsable de leur contenu, je me présente devant vous porteuse de ce message, de cette mélodie. Je n'ai fait que l'apporter. Tout le mérite en revient aux maître qui l'a créée. Et à la volonté providentielle qui a voulu que je me présente devant vous en un moment propice."
Elle s'inclina encore.
"Vous avez raison lorsque vous dites ne pas croire au hasard. N'est-ce pas le lot de chacun d'entre nous de nous plier à la volonté de nos supérieurs pour que l'harmonie naturelle perdure ? Ainsi mes pas ont été guidés jusqu'ici. Sûrement quelque Kami, ou quelque grand dessein nécessitait que vous puissiez entendre mon message... Mais je suis bien trop peu de chose pour questionner toutes ces choses qui me dépassent de loin."

Elle resta prosternée dans une attitude humble comme le troubadour craignant d'avoir provoqué la colère d'un seigneur. Le message était à présent clair pour qui savait lire entre les lignes. Bien sûr, il restait ambigü, mais on ne pouvait pas espérer de la part d'un shinobi une réponse limpide aussi tôt et en terrain inconnu... Simple question de sécurité. Simple test de l'interlocuteur....
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